It would not be giving away any secret or being indiscreet to say that to work for the Sevres National Manufactory, you need to be patient, and not be afraid (especially if you are a designer) of facing up to techniques, expertise, methods and ways of working that are more evocative of the pre-industrial era than the industrial or post-industrial age.
Personally, that suits me just fine. Basically, I’m not in such a hurry, although I haven’t got time to waste, obviously. It was during 2005, after some initial contact, that the new management of the Sevres National Manufactory gave me what was quite a specific commission: to work on the creation of new shapes (vases, bowls, dishes, plates…) that were intended to enter the rich heritage of shapes that the Manufactory makes available to artists or designers who are invited and are keen to produce a new design on a form that already exists.
Such a commission had not been given since the mid-1950’s. It was therefore a case of picking up where others had left off, carrying the story on to a new chapter.
Producing a form that was to be given a hypothetical future decor by a hypothetical future designer was like, to use the terms of the Manufactory and its traditions, producing an “unfinished” work.
This was precisely what attracted me.
Of course that does not mean, again using the terms of the Manufactory and its tradition, that the shape would be unfinished in the sense of being poorly finished (that would unthinkable for the Manufactory), but that it would not yet have completed the cycle that would allow it to move from the status of an available shape to that of a finished shape. From catalogued shape to exhibited shape. Or let’s say, from a form to an object. An object is a shape, but it also has a function, material, colour, decoration…it is this indivisible whole that constitutes the criteria that define, amongst other things, the distinctive nature of an object manufactured and stamped by the Sevres National Manufactory.
The unusual nature of the request quickly led me to think of the project in terms of shrinkage (shrinkage is also one of the techniques involved in ceramics, with between 15 and 18% of the material shrinking during the baking process in order to become porcelain). Shrinkage with regard to my own method of expression when designing the shapes. Going back to basics, looking for the essence of shapes, without going for blandness or worse, banality. Think Sevres! Produce shapes that make an impact, of generous proportions and size, are elegant yet understated, without excess, sparing on detail, and with a fluid style that allows the light to be reflected. So, little shade. Fit in carefully with the landscape of the Sevres National Manufactory. That is what made the project so tricky.
If we had to talk in pictures, all this would be the background, used when designing on a blank page (shapes that are to be decorated are always given to the invited artists as blanks). It was a question of designing a space, a place, an open piece of ground, welcoming, somewhere worth investing in, capable of being magnified, of encouraging and allowing other forms of expression to take root, other points of view. Such was the challenge of the project. Such perhaps was the policy at a time when so many firms are tending to go out of business.
To date, only the vase shapes (four-dimensional) and bowl shape have entered production. The shapes for plates and dishes are on hold for the time being. But we are already working on expanding the range.
Long live the new shapes!
Pierre Charpin, 2008
Ce n’est pas révéler un secret ni porter un quelconque discrédit, de dire que pour travailler avec la Manufacture Nationale de Sèvres, mieux vaut être doté d’un peu de patience, et ne pas craindre (surtout quand on est designer) de se confronter à des techniques, des savoir-faire, des rythmes et des cadences plus évocatrices de l’ère préindustrielle que de l’ère industrielle ou postindustrielle.
Pour ma part, cela me convient. Au fond, je ne suis pas si pressé, même si je n’ai pas de temps à perdre, faut-il quand même préciser.
C’est au cours de l’année 2005, après quelques premiers contacts, que la nouvelle direction de la Manufacture Nationale de Sèvres, m’a formulée une commande pour le moins spécifique : travailler à la création de nouvelles formes (vases, coupes, plats, assiettes…) destinées à rentrer dans le patrimoine des formes que la Manufacture met à la disposition des artistes où disons créateurs par elle invités, et désireux de produire un décor sur une forme déjà existante.
Une telle commande n’avait pas été passée depuis le milieu des années cinquante. Il s’agissait donc de reprendre une histoire laissée en suspend, une histoire à réactiver.
Produire une forme destinée à recevoir un hypothétique futur décor de la part d’un hypothétique futur créateur, équivaut, suivant les termes de la Manufacture et de sa tradition, à produire une forme « inachevée ».
C’est bien cela qui m’a enchanté.
Bien sûr cela ne veut pas dire, toujours suivant les termes de la Manufacture et de sa tradition, que la forme soit inachevée dans le sens de mal achevée (cela est impensable à la Manufacture), mais qu’elle n’a pas encore parcouru l’ensemble du cycle qui la fera passer du statut de formes disponibles à celui de forme accomplie. Du statut de forme inventoriée à celui de forme exposée. Ou disons, du statut de forme à celui d’objet. L’objet est forme, mais aussi fonction, matière, couleur, décor…C’est cet ensemble indissociable qui constitue les critères qui définissent, entre autres, les spécificités d’un objet manufacturé et estampillé Manufacture Nationale de Sèvres.
La singularité de la demande, m’a rapidement conduit à penser le projet en termes de retrait (le retrait est aussi un des invariants techniques de la céramique, entre 15 et 18% lors de la cuisson de la matière pour ce qui est de la porcelaine). Retrait vis-à-vis de ma propre expression pour le dessin de ces formes. Aller à l’essentiel, chercher l’essence des formes, sans que cela implique d’aller vers la neutralité et encore moins vers la banalité. Être Sèvres! Élaborer des formes à la fois présentes, généreuses, dans leurs volumes, leurs proportions, leur élégance et à la fois discrètes, sans excès de dessin, avec très peu de détails, et une volumétrie fluide qui laisse volontairement glisser la lumière. Peu d’ombre donc. S’inscrire délicatement dans le paysage de la Manufacture Nationale de Sèvres. C’est là que résidait toute la tension du projet.
S’il fallait parler en termes imagés, tout ceci consistait au fond, à concevoir une page blanche (les formes destinées à être décorées sont toujours proposées en blanc aux artistes invités). Il s’agissait de concevoir un espace, un lieu, un territoire ouvert, accueillant, un territoire à investir, susceptible de magnifier, de solliciter et de permettre l’existence d’autres expressions, d’autres horizons. Tel était l’enjeu majeur de ce projet. Tel est peut-être même son sens politique alors que tant de territoires tendent à se fermer.
Aujourd’hui, seules les formes vases (en quatre dimensions) et la forme coupe sont entrées en production. Les formes assiettes et plats, sont pour le moment mises en attente. Mais nous travaillons déjà à l’agrandissement du territoire.
Longue vie aux nouvelles formes !
Pierre Charpin, 2008